Des druides dans le Val-d’Oise

Le 21 mars, les assemblées druidiques célébreront l’équinoxe
de printemps. L’occasion de rencontrer Lanon, grand druide
dans le Val-d’Oise, qui nous a expliqué le fonctionnement
de sa communauté et les bases de leur philosophie.

Les quelques habitants de la petite commune du Val-d’Oise que nous croisons en cette matinée glaciale sont unanimes: «Des druides à Presles? Jamais entendu parler de ça !» À l’approche de l’équinoxe de printemps, l’une des quatre grandes cérémonies de l’année, nous nous rendons au local du Collège du Chaudron des druides à la rencontre de Lanon. Regard pétillant, cheveux blancs et chemise bleue, l’homme qui nous accueille est assez loin du stéréotype du druide à la longue barbe blanche.

Lanon –dont le nom signifie «clairière sacrée»–, nous invite à nous asseoir autour de la table sur fond de musique celtique. «On ne cache pas qu’on est druide, mais on ne s’en vante pas. Beaucoup de nos voisins sont au courant. Quand mes enfants allaient à l’école catholique, je soignais avec les mains des parents qui venaient me voir.» Devant mon air perplexe, il me propose une expérience. Il se place derrière moi, sans me toucher. «Vous sentez de la chaleur ?» En effet, je perçois quelque chose de très léger. «Là, vous allez reculer d’un coup.» Et voici que je me sens violemment poussée en arrière.

En harmonie avec toute chose

À 67 ans, ce retraité des télécoms est grand druide de son assemblée, la clairière bellovaque. Son épouse Gwenfea («fée blanche») travaille dans l’immobilier, elle est ban-drui («femme druide»). L’un de ses fils, Kélios («combattant»), 43 ans, technicien de laboratoire, nous rejoint. Il est vate (voir infographie), en formation druidique depuis quinze ans. «Il n’y a pas de prosélytisme chez nous, mon plus jeune fils a décidé de ne pas suivre la tradition, c’est un choix personnel.»

Lanon et sa famille nous accompagnent dans la forêt, sur leur site cérémoniel: un chêne centenaire, dans un large cercle délimité par de petits tas de pierres. Leur clairière se compose de 12 compagnons de 27 à 67 ans, aux professions diverses: fonctionnaires, coachs, commerciaux... Huit fois dans l’année, ils se réunissent à l’occasion des fêtes celtiques, des solstices et des équinoxes, et revêtent la saie, un manteau de lin blanc.

Les compagnons de la clairière bellovaque préfèrent parler de tradition druidique que de druidisme, terme jugé trop dogmatique. Selon eux, religions et philosophies sont les branches d’un même arbre qu’ils nomment la «tradition primordiale». L’idée principale relève du développement personnel: être en harmonie avec soi-même, les autres, son environnement et «faire au mieux». «Bien sûr, la tradition de nos anciens n’est plus tout à fait celle que nous pratiquons aujourd’hui», précise Lanon.

Pour les druides, toutes les choses sont égales et doivent être respectées: les femmes, les hommes, les plantes, les animaux et même les pierres. La famille, hétérosexuelle ou homosexuelle, tient aussi une place importante dans cette philosophie, et le jugement de l’autre n’est pas permis.

Liés par une pratique commune, les druides sont membres de l’Alliance celtique qui regroupe 12 clairières à travers le globe. Ils se réunissent tous les trois ans. Reconnu comme religion au Royaume-Uni, le druidisme compte des adeptes dans le monde entier. Difficile d’avancer un chiffre: les communautés ne sont pas répertoriées et aucun organisme ne régit ce petit monde. Mais elles ont en commun le culte de la nature, ainsi que les quatre grandes cérémonies de l’année.

À la disposition des autres

«Beaucoup de personnes nous contactent pour se former. Mais elles ont une idée saugrenue de notre philosophie, elles veulent faire de la magie. C’est une illusion. L’apprentissage druidique est transmis oralement et diffère pour chacun», explique Lanon. Au menu: recherches personnelles, étude des textes anciens et compréhension de la symbolique à travers les contes, légendes et mythes. Le druide offre ses services gratuitement et est toujours à la disposition des autres: «Le jardinier souhaite que la plante donne le meilleur d’elle-même, je souhaite la même chose pour mes compagnons.» Certains développent des dons, par exemple le soin avec des plantes médicinales, le magnétisme ou le maniement des pierres.

Après avoir quitté le cercle, nous revenons au village et Lanon nous montre le gui, le blé et les chardons devant la maison: «Nous les mettons dans le feu au solstice d’été, puis nous récupérons les cendres que l’on remet dans le brasier l’année suivante.» C’est le feu perpétuel, un symbole de transmission et de continuité.

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